mercredi 15 mai 2013

Tout est affaire de goût...

Ce qui différencie l’artiste est dans une large mesure son goût, son goût pour le beau, pour la beauté au sens large et son désir de rendre cette beauté malléable, compréhensible, transmissible. C’est ce goût, pour l’art et pour le beau, qui pousse à vouloir produire de l’art.

C’est de là que vient la démarche de l’artiste. Le sens de l’harmonie, le sens des couleurs, des mélanges, tout cela est question de goût.

Le goût, comme tout le reste, est certes quelque chose qui se travaille et qui s’entretient. Cependant, il faut aussi considérer qu’il existe pour tout artiste débutant ou néophyte un décalage entre ce goût et le produit. Ce que je veux dire par là, c’est que parfois, ce que vous dit votre goût et ce que vous êtes capable de produire sont en décalage. Bien sûr, ce décalage est rarement positif. La plupart du temps, lorsque vous démarrez dans une nouvelle activité, votre goût envisage les choses d’une certaine manière et ce que vous produisez n’y correspond pas !

Et c’est de cette déception que proviennent la plupart des abandons et des renoncements que je constate si souvent.

Bien sûr, vous savez que vous ne parviendrez pas à la perfection en quelques heures, et c’est quelque chose que vous pouvez accepter, mais il vous est difficile de reconnaître que ce que vous faites puisse être aussi grossier, maladroit et fragile. Vous trouvez que ce que vous produisez est de mauvais goût, imparfait, risible presque... et c’est cela qui vous pousse à abandonner. Un peu comme si un bébé reconnaissait qu’il lui est impossible de marcher correctement dès les premiers pas, mais ne parviendrait pas à surmonter le sentiment de honte et de rabaissement que lui inspirerait le fait de marcher comme un canard, les jambes arquées et le ventre en avant !

Ce que tout cela veut dire, c’est qu’en plus d’être difficile et insécurisant, vous serez déçu par ce que vous allez produire dans les premiers temps ! Et cette déception sera d’autant plus terrible que nous avons tous un certain talent pour porter sur nous-mêmes des jugements assassins !

Une fois de plus, tout ce que je puis vous dire, c’est que cela va prendre du temps et des efforts avant que vous ne parveniez à produire quelque chose qui soit à la hauteur de votre goût d’artiste. Cela va prendre beaucoup de temps avant que vous ne deveniez le présentateur numéro 1 de votre organisation. Beaucoup de temps et de travail. Il n’y a pas de raccourci, pas de sauf-conduit ou de pots de vin à verser.

En ce qui me concerne, pour m’affranchir de ce sentiment de décalage, je me souviens de l’histoire de ce chanteur africain, star en son pays qui un beau jour décide de rester chez lui, de ne plus composer et de cultiver son jardin...
Lorsqu’on lui pose la question de savoir pourquoi il ne chante plus, il répond : « Mais parce que je suis dans mon champ ».

Le résultat ne compte pas plus que cela, au moins dans les premiers temps... Ce qui compte, c’est d’être là, de faire et de produire. Le reste viendra.

Je vous souhaite d’être dans votre champ, et d’y être bien...


Ce billet est inspiré d’une citation d’Ira Glass que vous trouverez ici (en anglais) : http://writerunderground.com/2011/04/28/ira-glass-on-creativity-or-the-gap-between-our-taste-and-our-work/

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