lundi 22 mars 2021

L'épidémie, l'artiste et le monde de demain...

Je ne suis pas de ceux qui font de la musique "engagée". Je fais de la musique. C'est tout. 

Être musicien est déjà un engagement, une prise de risque, celui de se montrer, de se révéler, de vouloir donner un bout de soi, un bout de beau… Je fais de la musique parce que j'aime ça, parce que c'est plus fort que moi, parce que c'est en donnant de mon art que je reçois… C'est un bon deal…

J'ai tout de même envie de mon moment "protest singer" ! J'ai quand même envie de parler un peu et après je ne ferai plus que chanter !

On ne choisit pas la musique, c'est la musique qui vous choisit… Il y en a pour répondre à cet appel, d'autres pour résister… Pour beaucoup, ça veut dire des vies un peu plus compliquées, mais qu'importe ! 

Que serait le monde sans musique ? Que serait votre monde s'il n'y avait pas la musique ?

Parce que les musiciens sont aujourd'hui privés de lieux d'expression, ils n'ont jamais autant eu besoin de cette reconnaissance. 

Ces moments difficiles que nous traversons tous m'ont montré à quel point la musique pouvait réchauffer les cœurs, à quel point elle pouvait rassembler, créer un rendez-vous, un moment de partage… Un vrai musicien. Pas une radio, un enregistrement, mais la présence d'une femme ou d'un homme de musique. Près de chez vous !

Il n'y a pas que nos estomacs qui sont menacés par les sucreries et la junk food, il y a aussi nos oreilles. Nous vivons dans un monde où règnent les "one note melody" ! Les mélodies de la plupart des chansons d'aujourd'hui n'ont qu'une seule note ! Alors que des siècles d'apprentissage et des générations de musiciens ont permis d'inventer une musique faite de milliers d'intervalles et de milliers de notes possibles ! Pour moi, c'est la malécoute. C'est ce sucre sonore qui ramollit les cerveaux, oubli la subtilité et la nuance… 

Qui serais-je pour juger ? Il y a de la place pour tout le monde. C'est au public de choisir ! Mais vous savez bien que ce n'est pas le cas. Le public avale ce qu'on lui donne, par défaut d'éducation. Et plus c'est facile, bien emballé, bien "markété" et mieux ça marche. Avec des modèles comme celui-là, c'est la musico-diversité qui est menacée. Elle n'est pas menacée d'extinction, parce qu'un musicien répond à un appel et qu'un musicien compose, qu'il soit rémunéré ou non ! Mais à force de tirer la langue, qui sait si l'envie d'abandonner ne sera pas la plus forte ?...

Alors tout ça pour dire : soutenez les musiciens de vos immeubles, de vos quartiers, de vos villes… Apprenez à les connaître, allez les chercher, allez les écouter !

Soutenez la musique locale ! 

Soutenez votre musicien local !

On pourra s'émouvoir de la maladresse avec laquelle la plupart des artistes, et donc des musiciens et des chanteurs, tentent d'attirer l'attention sur leur situation. Il n'était peut-être pas bienvenu de se dénuder au moment des Césars pour que passent ce message de désarroi. Une fois de plus, une communication qui ne tient pas compte de celui qui doit la recevoir est vouée à l'échec ! Mais cela ne veut pas dire qu'il ne faut pas entendre avec bienveillance l'extrême inconfort dans lequel sont placés ceux qui vivent du don de leur art. Sans ce don, que devient la mission ? quel sens donner à la vie ? quelle raison de se lever le matin ? On me rétorquera que ce n'est que passager, que l'épidémie passera, que d'autres souffrent autrement plus violemment, que d'autres meurent... et c'est un fait. Mais au delà de la querelle, si cette épidémie nous permettait de comprendre l'importance de l'art, de la spiritualité, de l'intériorité, de la réflexion sur la consommation, l'apparence et la propriété... alors tout cela n'aura pas été inutile. Et une fois de plus, cela commence ainsi : soutenir ces artistes qui nous entourent. Aller au devant de leurs tentatives pour continuer d'exister, écouter leurs balbutiements et comprendre qu'ils détiennent, plus que beaucoup, une réponse aux enjeux de demain. 

Nous n'affronterons pas le réchauffement climatique, le véritable enjeu de demain, sans grandir en tant qu'espèce, et nous ne grandirons pas sans artistes. 

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